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Désexualiser les mots, enrichir son vocabulaire

[Article paru le 19/10/12, sur le blog Bas geek instinct – Les Inrocks : http://blogs.lesinrocks.com/basgeekinstinct/2012/10/19/desexualiser-les-mots-enrichir-son-vocabulaire/ et sur le site Etale ta culture : http://www.etaletaculture.fr/culture-generale/top-10-des-mots-apparemment-cochons/]

Alors même que notre belle langue de Molière est partout reconnue pour sa richesse et met à notre disposition un répertoire lexical très complet, que constate t’on ? Certains mots ne sont, aujourd’hui, que très peu utilisés par nos compatriotes. Pire, certains ont même été totalement évincés de notre vocabulaire, au simple motif que notre esprit mal tourné détourne leur véritable signification (souvent méconnue), en les affublant d’un sens imaginaire tout autre.

Mais alors, si un quiproquo embarrassant est vite arrivé, que faire pour réhabiliter, et nous rapproprier ces mots injustement mis au banc de nos conversations…?

Un premier pas, pour relever ce véritable challenge linguistique, consisterait à (ré)apprendre leur sens originel. Petit tour d’horizon, donc, de ces vilains mots tabous qui nous mettent (encore) très mal à l’aise en public (et pour cause) :

– Bitter

Pour commencer, res-pi-rons mesdames, il n’y a aucun mal à demander à un homme « ce qu’il bitte ». Au contraire, cela signifie que vous vous intéressez à lui, car en vieux français, cela revient, non pas à lui demander ce qu’il vaut au lit, mais bien quels sont ses projets, ses buts dans la vie.

– Jaculatoire

Messieurs qui êtes judéo-chrétiens, vous aussi, devriez pouvoir expliquer à vos compagnes (judéo-chrétiennes, elles-aussi) que vous souhaiteriez un peu d’intimité, afin de vous livrer tranquillement à une oraison jaculatoire (courte prière en direction de Dieu) sans qu’elles vous regardent avec des yeux ahuris.

– Goder

Madame, si votre collègue de bureau, hoche la tête d’un air réprobateur, à la vue de votre jupe-tailleur, en laissant échapper un « je n’aime pas quand çà gode », n’ayez crainte : il n’est pas en train de juger négativement ce que vous avez (peut-être) fait la veille avec votre jouet préféré, mais plutôt de vous rendre service en vous indiquant que votre jupe fait des faux plis.

– Branler

Messieurs, sachez que la branle désigne une sorte de danse collective très ancienne, remontant aux rondes du moyen-âge. Ainsi, en soirée, n’hésitez plus à demander à votre partenaire de vous « accorder une petite branle ». Avec un peu de chance – cette dernière ayant lu cet article – votre requête ne lui inspirera ni indignation, ni dégoût et elle vous tendra son bras avec plaisir (ailleurs que dans votre face).

– Invagination

Madame, si suite à une échographie abdominale, votre médecin vous annonce que vous avez une « invagination intestinale », cela est très préoccupant certes, mais ne cédez pas pour autant aux interprétations hâtives : votre vagin n’est pas hors-service et n’a pas, non plus, migré au niveau de votre appareil digestif. L’invagination (ou intussusception intestinale) est un terme médical, désignant l’incorporation d’un segment d’intestin dans la portion intestinale située plus en aval. Pas vraiment rassurant, mais – encore une fois – rien de sexuel dans ce mot à consonance barbare.

– Vergeter

Rassurez-vous : strictement aucun rapport avec le mot verge, au sens pénis du terme. De même, vous pouvez d’ores et déjà ranger votre fouet et vos menottes au placard, ainsi que toute l’artillerie SM dont vous disposez. Cela ne vous sera pas utile puisque vergeter signifie simplement nettoyer, brosser un vêtement ; Notons qu’il est, par ailleurs, possible de s’auto-vergeter.

– Concupiscence

Non, ce n’est pas un terme patchwork rassemblant en un seul, les trois mots : con, cul et pisse, et évoquant une nouvelle pratique sexuelle à tendance scatologique. La concupiscence désigne seulement un penchant pour les plaisirs sensuels.

– Bander

Il y a quelque temps, si des amis vous avaient proposé de venir les aider à « bander » tout un week-end dans leur nouvel appart’, vous auriez décliné l’invitation, gêné, pensant être invité par des libertins à un week-end échangiste. Oui, mais cà c’était avant de lire cet article. Maintenant, vous accepterez volontiers de prêter main forte à vos amis pour leurs travaux, en joignant quelques plaques de plâtre dans la bonne humeur et à la bonne franquette.

– Piper

Monsieur, lorsqu’au détour d’une conversation, votre nouvelle petite amie vous dit « ne rien piper », sachez que tout espoir de sexualité épanouie n’est pas définitivement perdu. En fait, pas de panique, votre dernière conquête n’a vraissemblablement rien contre les pratiques bucco-génitales, mais vous fait savoir qu’elle souhaiterait plus de détails, afin de comprendre ce que vous êtes en train de lui raconter.

– Yakitoris

Et enfin, Madame, si un homme vous dit, l’oeil brillant et un filet de bave au coin des lèvres : « Je me ferais bien un Yakitoris ce soir », pas la peine de vous enflammer. Il n’a probablement pas en tête de mordiller, d’emblée, votre petit bouton d’amour magique. Les yakitoris (littéralement « oiseau grillé » en japonais) sont de délicieuses brochettes de viande, cuites au gril… (Comme un oiseau, vous planerez peut-être, mais d’un point de vue gustatif seulement).

Voilà. Si malgré ce debriefing, vous persistez à vouloir éviter ces 10 mots, on ne peut vraiment plus rien pour vous. Vous avez définitivement un esprit trop pervers…

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