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« Prix littéraire e-crire au féminin 2014 »- Le déni.

Pour changer un peu de registre – une fois n’est pas coutume – voici une courte nouvelle écrite dans le cadre du concours d’écriture organisé par le site Au Féminin.

 

                                                      Le déni

 

http://www.aufeminin.com/ecrire-aufeminin/le-deni-s958714.html

 

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Culture du viol dans les médias : Quand le Point conseille aux femmes d' »accepter la brutalité de leur amant».

Le « Rape culture » (« culture du viol »), terme utilisé pour la première fois par les féministes dans les années 1970, semble décidément plus que jamais au goût du jour, tant le concept apparaît omniprésent dans nos médias.

Si par « culture du viol », on entend tout un appareil de pensée, de représentation, de pratiques et de discours qui excusent, banalisent, érotisent voire encouragent la violence sexuelle, alors c’est bien le magazine Le Point qui, sur son site, nous offre cette semaine, le plus beau cas d’école.

Traitement médiatique inapproprié de la violence sexuelle

Dans cette chronique pourrie et teintée d’humour graveleux, intitulée « Les conseils avisés de nos amies les bêtes de sexe(1) : pratiquer avec modération l’amour sado-maso », deux journalistes du Point (Frédéric Lewino et Gwendoline Dos Santos) s’improvisent, pour l’occasion, experts en relations conjugales et se croient obligés de distiller leurs « bons » conseils, afin de booster notre libido.

Le tout, bien-sûr, vidéo à l’appui :

Cette vidéo, donc, montre un accouplement de tortues Hermann (Testudo Hermanni), au cours duquel le mâle s’efforce maladroitement de monter sur la femelle, après l’avoir au préalable immobilisée, au moyen de légers mordillements et autres petits coups sur sa carapace.

Accumulation de préjugés sexistes

Il n’en fallait pas plus à ces 2 journalistes, pour nous proposer sur un ton rigolard, une grotesque mise en abyme du comportement sexuel humain, à travers celui de l’espèce animale. Et de nous expliquer, via une consternante énumération de clichés et préjugés sexistes relatifs à la culture du viol, comment la tortue Hermann prend son pied en morflant.

Chacun l’aura compris, le débat ne se situe pas dans l’opportunité même d’un tel parallélisme, mais bien dans la façon dont celui ci est traité, en opérant insidieusement un report de la culpabilité du viol sur la victime.

L’article s’appuie, en effet, sur 6 points clés de la culture du viol :

* La banalisation

« La tortue de Hermann mâle cogne sa partenaire. C’est du reste, un comportement fréquent dans le monde animal. »

Et voici comment, en guise d’entrée en matière, les journalistes nous présentent donc la violence sexuelle comme une norme.

* La justification

« La violence conjugale est une façon commode pour le mâle de montrer sa virilité aux femelles de rencontre »

« Que demande une femelle, au fond ? Que le père de ses enfants soit un gagnant, un mec à la redresse suffisamment fort pour survivre et donc susceptible de leur transmettre les meilleurs gènes. »

«  Chez beaucoup d’espèces, le mâle apporte la preuve de sa combativité en affrontant d’autres mâles. Chez la tortue d’Hermann, les populations sont trop faibles pour que plusieurs concurrents se retrouvent autour d’une femelle. Du coup, la seule façon de prouver sa force (…) c’est de battre sa partenaire. »

En clair, le mâle cogne, mais il a une bonne excuse qui tient en ce que la Nature l’oblige à affirmer sa virilité. Autrement dit, l’agresseur, soumis à des « pulsions naturelles », à des « instincts incontrôlables », n’est pas en mesure de prendre en compte le refus de sa victime. C’est donc à cette dernière de prendre en charge la faiblesse de l’agresseur, en adoptant une tenue et un comportement adéquat ( =non provocant).

* La mise en doute du refus de la victime

« Est-ce un viol ? […] la femelle pourrait tout simplement l’éviter en avançant »

« Et soyez sûr que si la femelle n’aimait pas être cognée, elle saurait s’enfermer dans son coffre-fort de carapace. »

Qui ne se défend pas, consent. Mieux, tant que la victime n’a pas un pistolet sur la tempe, elle peut se débattre, sinon c’est, qu’au fond, elle le voulait bien. On retrouve dans ces propos, cette notion de « viol gris », décrite par le magazine Cosmopolitan comme une relation sexuelle qui se situerait « quelque part entre le consentement et le refus », et où « les deux personnes ne sont pas sures de qui voulait quoi »

* L’érotisation de la violence sexuelle

« Chéri, chéri, fais-moi mal! »

« Plus il la brutalise, plus elle aime »

« Elle en redemande, la vicieuse »

Ici, les journalistes jouent sans complexe avec le concept du « No means yes », (un non qui signifie oui) que l’on retrouve également dans le langage BDSM, ou encore dans le fameux mythe du fantasme féminin du viol, (par lequel le fait d’être violentée ou forcée ou violentée constituerait un facteur d’excitation chez la femme).

* Le transfert de la responsabilité du viol

Ce transfert a lieu lorsque l’on insinue, en multipliant les reproches faits à la victime, que celle-ci l’ « avait bien cherché » (« Que faisait-elle toute seule, à telle heure, à tel endroit? « Elle avait trop bu », « portait une tenue aguichante ») ; ou encore lorsque les médias se focalisent sur la personnalité de la victime (« Elle était réputée avoir des mœurs légères » (cf la récente affaire du viol aux 36, Quai des Orfèvres à Paris)

Dans l’article du Point, notre pauvre tortue, quant à elle, « multiplie durant toute la saison les rapports sado-maso » et « en redemande, la vicieuse ».

Parfois, ces critiques – proférées non pas à l’encontre du violeur, mais à celle de la victime – tournent même au « slut shaming »(« humilation de salopes »), ce phénomène odieux qui consiste à blâmer publiquement (via les réseaux sociaux, par exemple) une femme pour ses rapports sexuels, même non consentis. Comme cela est arrivé à cette jeune femme, qui, après avoir été violée, a été ridiculisée sur internet.

Le viol n’est alors plus abordé comme une violence à l’égard des femmes, mais comme une atteinte aux bonnes moeurs et à l’honneur de l’homme.

* l’incitation, encouragement au viol

Inciter au viol, c’est par exemple, conseiller à un homme d’« insister un peu » si sa partenaire ne veut pas, comme l’avait fait allégrement ce pédiatre, lors d’un entretien dans Elle. C’est aussi lorsque la violence sexuelle est directement prescrite, même sur le ton de la blague, à l’instar de cet article du Point qui s’emploie à promouvoir des pratiques sexuelles brutales envers les femmes, sans se soucier d’une éventuelle absence de consentement.

Si ce genre d’écart journalistique est évidement indigne d’un journal comme Le point, il n’en demeure pas moins, hélas, récurrent. Dans la même veine sexiste, on se souvient entre autre de ce tweet nauséabond, à l’occasion de la mort de l’actrice Jayne Mansfield :

Accompagné de cette prose ignoble, de même acabit, et signée de ce même tandem Lewino/Dos Santos, épinglée dans le site Tout à l’ego :

« La voiture de Jayne Mansfield, 163 de QI et 115 de tour de poitrine – et pas l’inverse, malheureusement -, s’encastre dans un camion »

« L’autopsie précise que la mort est due à « l’écrasement du crâne avec extirpation du cerveau ». Au moins cette blonde en avait-elle un ! »

« Pour compléter ses talents, elle est également exhibitionniste et nymphomane. 

Bref, la femme parfaite. »

Et combien d’autres inélégances de la part de journalistes masculins du Point, à l’égard de leurs consoeurs (L’une d’entre-elles dénoncée ici, sur le site ArrêtsurImages,net )

 

Peut-on vraiment rire de tout ?

Comme le souligne Lindy West de Jezebel, les blagues sur la violence sexuelle restent généralement assez malsaines, dans la mesure où elles « ont pour effet d’affirmer le pouvoir de l’homme sur la femme (,,,) et ne font que perpétuer une dynamique qui rend l’agression sexuelle normale et acceptable ».

Car, en réalité, ces blagues sont rarement anodines et n’ont pas le caractère spontané et franchouillard qu’on voudrait bien leur prêter. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque j’ai voulu linker cet article du Point dans ce billet ! Le titre attaché au lien n’est pas celui de l’article mais :

http://mobile.lepoint.fr/sciences-nature/les-conseils-avises-de-nos-amis-les-betes-de-sexe-1-accepter-une-petite-dose-de-brutalite-de-la-part-de-son-amant-21-07-2014-1847708_1924.php

 Tout est dit…

Y aurait-il lieu de penser que le titre initial de l’article – et l’on comprend fort bien pourquoi – aurait été légèrement retoqué après « modération » de la rédaction ?

Vraiment, on ne saurait que trop conseiller à certains journalistes du Point, de cesser de vouloir faire du clic à tout prix, en prodiguant leurs conseils sexistes en matière de libido et de retourner, bien vite, à des sujets qu’ils maîtrisent mieux. 

Manifestement, il reste du boulot pour combattre et déconstruire tous les stéréotypes sexistes qui alimentent la culture du viol. Mais malheureusement, force est de constater que les médias représentent, aujourd’hui encore, un vecteur privilégié de la transmission de cette culture.

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« Gaspard », nouvel accessoire connecté anti-viol : le drame de l’indifférence.

En France, certaines études avancent qu’il n’y aurait pas moins d’une victime de viol, toutes les 8 minutes. Pas étonnant, dans ces conditions, que certains concepteurs voient en ce fléau un marché potentiel.

Dans mes mails hier, celui de Mr Desachy Nicolas, à l’origine de la création d’une nouvel objet connecté anti-agression, répondant au doux nom de « Gaspard ».

 

Il s’agit, donc, d’un petit gadget pouvant se fixer discrètement sur vos vêtements, votre sac à main, vos bijoux, ou même dans vos cheveux, de façon à être facilement accessible en cas d’agression. Connecté à votre téléphone, par simple pression, il permet de vous géolocaliser et de déclencher immédiatement l’alerte auprès de vos proches, de passants se trouvant autour, de la police ou de toute autre personne ayant téléchargé l’application. Ces derniers reçoivent également, en temps réel, un itinéraire pour venir vous secourir rapidement.

M’invitant tout d’abord à visionner la vidéo de présentation pour mieux en comprendre le fonctionnement, ce dernier m’exhorte ensuite à lui faire un « retour » objectif. Ce que je m’empresse de faire, par retour de mail et ici.

Rappelons d’abord, en postulat de départ, que même si ce sont avant tout les mentalités qu’il faut changer par un travail d’éducation, toute initiative susceptible de permettre d’éviter ne serait-ce qu’un viol, est, par essence, à saluer.

Ce qui, néanmoins, n’interdit pas d’émettre quelques réserves quant à la réelle efficacité de ce nouveau concept. Car derrière la vision idyllique proposée par la vidéo de démonstration, semble cependant subsister des problèmes techniques de taille.

Chacun sait qu’en France, toutes les zones géographiques ne sont pas égales du point de vue de la couverture du réseau de téléphonie mobile. Quid de l’intérêt d’une telle application en zone reculée Ardéchoise, par exemple ? Ou en cas de pannes de réseau (et Dieu sait si cette éventualité est fréquente chez certains opérateurs) ?

S’il faut reconnaître que cet objet est beaucoup plus confortable et discret à porter que d’autres accessoires anti-viols imaginés jusqu’ici (culottes, jean, soutiens-gorge, collants anti-viol, etc…), c’est aussi et surtout parce qu’il n’est pas destiné à éviter techniquement le viol, mais simplement à signaler que celui-ci est en train de se produire. Une nuance d’autant plus importante que le temps écoulé avant qu’une personne prévenue ne se porte au secours de la victime, peut parfois être très long (la majorité des femmes violées le sont en quelques minutes, voire quelques secondes).

Comment ne pas imaginer, également, puisqu’« qu’une simple pression suffit à déclencher » le processus d’alerte, les conséquences (non prévues) d’une possible fausse manip’. Il pourrait ainsi être particulièrement cocasse de voire débarquer Papa, un inconnu ou pire, Jules, alors que vous vous adonniez, à l’abri des regards, à des ébats (bien consentis) dans les bras de votre amant d’un soir…

Loin de remettre en question les intentions sincères des inventeurs de cet outil, je ne suis pour autant pas totalement convaincue lorsque ces derniers estiment que leur communication « joue sur un accessoire de mode, mais ne surfe pas sur le commerce de la peur ».

Parce qu’absolument tout dans leur vidéo évoque, au contraire, la peur : petits bonhommes effrayants représentant les agresseurs, femme prise au piège dans une cage transparente, représentation concrète d’armes de défense (pistolets, couteaux, etc…).

Mais, après tout, pourquoi éprouver une telle nécessité de s’en défendre ? Pourquoi, diable, une invention destinée à rassurer les femmes naîtrait forcément de mauvaises intentions, et devrait obligatoirement se priver d’avoir des ambitions commerciales ?

En réalité, cette invention « connectée » (qui s’appuie, donc, sur le concept de « réseaux sociaux »), surfe plus sur le marché de la solitude, de l’indifférence générale et de l’égocentrisme, généré par notre triste société. En concluant sa démonstration par un « You’ll never be alone again » (« tu ne seras plus jamais seule »), les concepteurs semblent exploiter les mêmes faux-semblants et miroirs aux alouettes que les Facebook, Twitter and Co, donnant à leurs usagers l’illusion d’être « entourés », d’appartenir à une grande communauté.

Mais en vérité, combien, parmi leurs contacts virtuels (et même réels) accourront vraiment, en cas de danger?

Il est permis de douter, lorsqu’on voit qu’aujourd’hui, on peut se faire agresser en plein métro à Lille, sous le regard indifférent, imperturbable de ses semblables.

Plus encore, je trouve aussi particulièrement malsaine, l’idée de relayer, quasi en direct, les pseudo-sauvetages sur les réseaux sociaux. Mettre ainsi à l’honneur les « héros » du jour à grands coups de « like » (le site pousse même la mise en scène jusqu’à leur offrir des mugs, t-shirts et autres trophées à son effigie) revient, au final, à rendre « exceptionnel » un geste qui, au fond, devrait être banal.

Un simple acte de civisme. Un réflexe de savoir-vivre.

 

[ Retrouvez également ce billet sur Cheek Magazine ]

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« Adopte un curé » : la campagne racoleuse et hypocrite de l’Eglise Normande.

 

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« Adopte un un curé » : Telle est la nouvelle trouvaille de l’Eglise Normande pour relancer les dons en faveur du denier du Culte. S’inspirant du site de rencontres « Adopte un mec », cette campagne choc a pour but d’inciter la jeunesse chrétienne à mettre la main au portefeuille.

Regarder le clip de lancement de Adopte un curé sur You Tube

Dans ce clip publicitaire « divin », pas de sermon dogmatique ni d’oraison sentencieuse. Un jeune curé, soutane affriolante et physique à mi-chemin entre gendre idéal et prince charmant (un acteur, précise Le Point) qui n’attend, mesdames, mesdemoiselles, plus que vos dons pour s’offrir à vous corps et âme.

Et hop, fantasme féminin de la soutane à peine suggéré… Au diable vœux d’abstinence et autres pêchers interdits !

Une Eglise prête à tout pour moderniser son image

Grâce à ce coup marketing, l’Eglise espère avant tout rafraîchir, « déringardiser » son image. Les 6 évêques normands confient ainsi vouloir élargir leur public et atteindre une cible nouvelle : les 18 à 40 ans. Le choix d’un site de rencontre plutôt récent et prisé par les jeunes, refléterait ainsi leur volonté de se montrer proches d’eux, de leur mode de vie, de leurs codes. A l’ère des réseaux sociaux et des rencontres en ligne, la « Maison de Dieu » entend faire savoir qu’elle aussi, vit avec les progrès de son temps.

Parce que ouais le Pape est ouvert, ouais le Pape est cool : il surfe sur le web et a même un compte officiel sur twitter. Ouais le Pape aime le Djeuns… (Il a juste un peu de mal avec un petit bout de latex qui peut lui sauver sa vie de Djeuns).

La collecte du denier ne fait plus recettes ? Qu’à cela ne tienne. La religion est un business comme les autres. Les dévotes adopteront un curé/évêque/diacre/pape, que sais-je encore, tandis que L’Eglise, quant à elle, « adoptera » une statégie marketing plus propice à sa croissance.
Ce, quitte à renier éhontément ses valeurs fondamentales.

Il y a de l’idée là-dedans… Mais surtout beaucoup d’hypocrisie.

L’hypocrisie au service de la cupidité

L’argent saint n’a pas d’odeur. C’est pourquoi, les hommes de dieu n’hésitent pas à mettre de l’eau dans leur vin, allant même jusqu’à plébisciter – via une campagne racoleuse – des valeurs aux antipodes de celles habituellement prônées par les catholiques.

Qu’elle semble bien renvoyée pour toujours au temps jadis, cette conception poussiéreuse de la relation homme-femme, bâtie sur des principes obsolètes de chasteté ante-nuptiale, d’engagement mutuel, de fidélité, etc… Money is money : L’Eglise semble décidément prompte à remiser au placard ses vieilles lubies sur le couple, promouvant désormais des relations libres et légères où l’amour se consomme en un clic.

Tout juste l’Eglise devra t-elle encore faire l’effort de se dérider un peu en matière de contraception, afin de rendre cette affligeante mascarade plus crédible.

Car cette pathétique vidéo pseudo-humoristique laisse à penser que l’Eglise, à l’instar du site Adopte un mec, confère aux femmes un certain pouvoir décisionnel. Un comble lorsque certains catholiques sont aujourd’hui encore (tiens, plus d’humour sur ces questions-là?) réticents à donner aux femmes, ne serait-ce que le droit de disposer de leur propre corps en cas de grossesse non désirée. Et plus généralement, la religion catholique – soyons tout-à-fait honnête – n’a jamais fait référence en matière de considération de la femme au sein de la famille, de la société et encore moins au sein de l’Eglise (A quand, d’ailleurs, les femmes prêtres?)

Bref, entre luxure, cupidité et hypocrisie, la nouvelle campagne publicitaire de l’Eglise Normande, nous rapproche finalement plus des 7 péchés capitaux, que de l’image idyllique dont elle voudrait bien se parer.

Vendre son âme au diable pour renflouer les caisses de Dieu, soit… Reste maintenant à savoir si ce nouveau concept marketing s’avérera ou non payant.

 

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Couples, Sexe et trahisons sur M6. Quand « Zone interdite » fait du jounalisme poubelle.

La chaîne M6 a, une fois de plus boosté son audimat, avec son désormais coutumier « do«cul» du dimanche soir. « Teasing » racoleurs et reportages « sensationnels » (sexe, drogue, adultères, prostitution, argent sale…), c’est presque à chaque fois, le même « branle-bas de combat audimétrique » sur la chaîne de « Zone interdite » et « Enquête exclusive ».

C’est donc le plus naturellement du monde que ce dernier « Zone Interdite » du 16 février, nous proposait cette fois de plonger dans l’intimité de plusieurs couples en crise, avec un reportage sobrement intitulé – une fois n’est pas coutume – : « Prêts à tout pour sauver leurs couples ».

Fausse pédagogie

La journaliste-animatrice Wendy Bouchard lance pompeusement l’ « enquête », laissant entrevoir aux téléspectateurs, la possibilité de découvrir des pistes de réflexion, voire des clés pour sauver les couples en perdition. A noter, d’ailleurs, qu’elle clôturera également l’émission en insistant sur l’aspect « éducatif » du reportage (« Vous l’aurez compris, hein, il existe des solutions pour s’en sortir »).

Après les généralités d’usage d’ordre statistique* , les présentations…

Nous voici donc « en route » pour la soirée, avec 4 beaux cas d’école de couple en déclin, qui ont « gentiment-accepté-de-se-laisser-filmer-pendant-un-an-par-nos-équipes-de-reporters». Des personnes comme vous et moi, donc, qui ont consenti à livrer sur un plateau (au sens propre comme au figuré) les détails de leur vie privée – tant qu’à faire – de leur vie sexuelle.

Manque de spontanéité

Au cours des séquences de vie qui se succèdent, tout y est : déballage de linge sale, règlements de compte en public, confidences croustillantes, larmes et insultes que l’on devine – à peine – sur commande.

Quand bien même cette équipe de journalistes serait restée 24h sur 24h pendant un an au chevet de ses couples qui se déchirent, sommes-nous assez dupes pour croire que leurs caméras (si discrètes fussent-elles) se trouvaient miraculeusement là dans les moments cruciaux ? Comment juger de la spontanéité de scènes « intimes » entre personnes qui se savent filmées ?

D’ailleurs, Au vu de certains passages surjoués, le téléspectateur aura plutôt eu l’impression de se retrouver devant une sorte de reconstitution, servie par un mauvais jeu d’acteurs. C’est notamment le cas de cette dispute surréaliste où l’un des conjoints, se sachant pourtant filmé, insulte copieusement sa compagne, ainsi que la journaliste présente sur place.

Racolage facile et voyeurisme

Que dire, en outre, de ce portrait racoleur de Martine, cinquantenaire malheureuse dans son couple, en quête d’affection, qui cherche à oublier ses déboires aux bras d’amants d’un soir… Du pain béni pour des réalisateurs qui n’ont pas lésiné sur les gros plans accrocheurs des bas noirs, talons, fesses et décolletés exhibés de cette femme en grande souffrance psychologique.

Une phrase expliquant qu’elle se pliait à tous les jeux pervers de ses amants pour leur plaire, aurait ainsi largement suffit à éclairer le téléspectateur sur la situation, plutôt que de consacrer de longues minutes de reportage à la contemplation de ses tenues fétichistes, ou bien à la façon de boutonner sa robe en latex.

Psychologie de comptoir et exploitation de la détresse humaine

Chaque séquence, est bien-entendu, entrecoupée d’analyses, de conseils de psy, thérapeute conjugal et autre gynécologue de renom, histoire d’apporter un peu de crédit à un « reality show » qui se verrait mieux en reportage éducatif.

On peut se demander à quel niveau d’exhibitionnisme, de cynisme ou bien de désespoir faut-il se trouver pour en être rendu à confier à des journalistes, le rôle de témoin voire de médiateur de ses problèmes conjugaux.

Reste-t-il vraiment quelque chose à sauver de son couple, lorsqu’on accepte ainsi de sacrifier sur la place publique, ce qui normalement devrait constituer son bien le plus précieux : son intimité ?

Difficile de dire ce qu’il y a de plus pathétique, finalement, entre hypocrisie et abus de faiblesse de la part de journalistes qui se servent éhontément, dans le grand bazar de la détresse psychologique.

Les protagonistes de ce genre de reportage sont utilisés comme de la chair à canon, sacrifiés sur l’autel de la guerre de l’audimat.

Que leur a t-on promis au juste… Que leur témoignage aiderait d’autres couples en difficultés ? La bonne affaire! Il semble que les bénéfices tirés soient bien mince, au regard des risques encourus.

Après que, successivement, les journalistes, la société de production, la chaîne et les téléspectateurs se sont tous bien repus de leur histoire, c’est maintenant au tour des internautes de se délecter. Martine, cliché trop parfait de la femme d’affaires cougar nympho-maniaco-dépressive, moquée sur le web, est devenu malgré elle une véritable « star » sur twitter, comme l’indique le site Metronews. Et on ne peut qu’imaginer les répercussions désastreuses de ce « buzz » involontaire sur l’état psychologique de cette dernière (Mais de cela, personne pour s’en soucier, l’audimat est fait).

Reste que si M6 souhaite verser dans la télé-réalité, après tout, c’est son choix. Mais qu’elle l’assume jusqu’au bout et ne nous vende pas ce genre de programme comme du « reportage », diffusé dans le cadre d’un « magazine d’information et d’actualité ».

Rien n’est plus exaspérant que de se voir ainsi infliger des leçons d’art de vivre conjugal… A fortiori par ceux qui, en ce qui les concerne, mériteraient bien une petite leçon de journalisme.

*« Un mariage sur deux, en France, se solde par un divorce », « Les premières causes de rupture conjugale sont l’infidélité, l’argent, la belle-famille et le travail », etc…

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Un détaillant japonais lance une ligne de lingerie Disney : drôle ou ringard ?

Petite « révolution » dans le monde de la lingerie féminine : Un détaillant japonais vient tout juste de créer une ligne de sous-vêtements, inspirée directement des robes portées par les princesses Disney.

Et bien-sûr, à peine l’annonce du lancement effectuée, les médias s’interrogent déjà sur la façon d’appréhender une telle collection.

A en juger sur la forme, d’abord, il faut bien se rendre à l’évidence : le monde de la lingerie Disney est un monde « désenchanté » plus qu´un monde « enchanteur »… Car avec une telle ligne de sous-vêtements (pardon pour celles qui l’auraient déjà acheté sur un coup de tête), c’est à coup sûr le désenchantement qui guette Monsieur « Prince ».

Lingerie ringarde, pas sexy

Là où l’on attendait le rêve, les paillettes, la féérie Disney, le Styliste-Designer Japonnais casse tout. Formes ringardes et pas sexy pour un sou, lignes très sages voire déprimantes ; Pas de string, tanga ni balconnets affriolants, mais culottes et soutiens-gorge « gentille fifille » à petits noeuds et froufrous.

Gros « fail », également, au niveau deu choix des couleurs : point de coloris chatoyants tendances, mais au contraire des teintes pastel blafardes et rétrogrades : vieux bordeaux délavé de grand-mère pour Aurore, mauve fadasse cafardant pour Raiponce, jaune moutarde à refiler la nausée pour Belle, et enfin, bleu glaciaire qui refroidirait un âne en rut pour Cendrillon.

Une collection de lingerie Disney pas aussi sexy qu’on voudrait bien nous la présenter, donc, mais disons tout au plus « romantique », pour ne pas dire mièvre. Le genre de sous-vêtements qui pourraient convenir [admettons] pour de (très) jeunes filles [éventuellement], adulte attardée [à la rigueur], vierge neurasthénique [pourquoi pas] ou bien pour une blague d’un soir [exceptionnellement]. Admettons…

Si l’on s’attarde sur le fond, à présent. Peut-on considérer cette nouvelle ligne de lingerie comme cliché? Drôle? Ou bien choquante?

Cliché?

On pourrait ainsi concevoir que certaines féministes y voient un cliché genré de plus.

Les 4 princesses égéries de la marque japonaise de sous-vêtements n’ont, en effet, pas été choisies par hasard : toutes, à la fin de l’histoire, finissent par « choper ». Le message principal véhiculé étant qu’on n’attrape pas ce gros relou de prince avec du vinaigre mais avec de la lingerie « sexy »…

Drôle?

Il faut tout de même concéder que le concept est assez original. Certaines y verront peut-être une bonne occasion de jouer l’effet « surprise », afin de ravir le coeur du Prince. Rigolote ou sexy, certes, il faudra choisir. MAIS étant donné que « homme qui rit à moitié dans ton lit.. » Si monsieur adhère à ce genre d’humour, tout espoir (charnel) est encore permis.

Choquant ?

Ce n’est pas la première, et ce ne sera sans doute pas la dernière fois que des vêtements ou objets sont ainsi estampillés Disney. On trouve bien des serviettes de bain Disney, des pyjamas, des tongues, des montres Dysney, alors pourquoi pas des sous-vêtements Disney? A fortiori si ces derniers n’ont vraiment rien de trash et relèvent même plus du kitsh que du sexy.

Ce qui aurait été beaucoup plus dérangeant, c’est de voir commercialisés des objets à réelle connotation sexuelle – et donc à destination d’un public « adulte » – sous un label qui, lui, a au contraire une visée « enfants » ou « jeune public ». On verrait mal, par exemple, un préservatif ou encore un vibro Disney.

Cette nouvelle collection de lingerie est donc, à mon sens, plus anecdotique que révolutionnaire ou même choquante. Et pour ma part, je crois que je vais m’abstenir de porter cette tenue de princesse prout-prout, même si je revendique avoir toujours gardé une âme d’enfant.

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Fêtes de fin d’année : Quand La Foir’Fouille « brade » l’image des femmes…

« A la Foir’Fouille, tu trouves de tout si t’es malin… ». Le slogan de l’enseigne déco/bibelots/articles festifs n’a jamais été aussi aussi vrai…

On n’y trouve de tout, oui. Mais surtout, en page 6 du catalogue spécial fêtes de fin d’années, une bonne flanquée de clichés sexistes nauséabonds et surannés.

Alors que je me demandais, comme chaque année à l’approche des fêtes, ce que j’allais bien pouvoir me mettre sur le dos, un petit miracle s’est produit. Il n’en fallut pas plus qu’un simple tour de clé dans ma boite aux lettres, ainsi qu’un rapide coup d’oeil sur le nouveau catalogue La Foir’Fouille, pour avoir LA révélation.

Pour le réveillon de la Saint- Sylvestre, sous le thème « Soirée sexy », le magasin discount propose, en effet, aux femmes en mal d’idée de tenue vestimentaire, trois déguisements complets à prix modique. La consommatrice maligne et férue de bonnes affaires que je suis, pourra donc « choisir » entre un classique « déguisement soubrette », un plus original « déguisement de pirate sexy », à moins qu’elle n’opte finalement pour une valeur sûre : le « déguisement infirmière ».

Possible que cela vienne de moi et de ma fichue propension à voir le mal partout. Peut-être devrais je me contenter de m’administrer un bon coup de pied aux fesses et accepter, de bonne grâce, de revêtir la panoplie « secrétaire sévère » afin que la fête soit plus folle…

Sans doute arriverai je à m’auto-persuader en me disant que,  « d’une pierre deux coups », je n’aurai plus besoin de courir les traiteurs, à la recherche d’amuses-gueule : j’en serai un géant à moi toute seule.

Allez, c’est décidé : Cette année j’irai au bout de la nuit ! (dernière de 2013, donc) mais, désolée… PAS EN SOUBRETTE.

Mon sens festif peu développé me joue probablement encore un vilain tour, mais – outre le mauvais goût caractérisé de ces accoutrements ultra « cheap » – il semblerait que le directeur (ou la directrice) marketing des magasins La Foir’Fouille ait quelque peu « foiré » au niveau de la com’.

Il /elle ne pouvait, en effet, « ignorer » la connotation sexiste que ce catalogue publicitaire véhicule à l’égard des femmes. Il doit être, certes, très vendeur d’y faire figurer des potiches déguisées en gourdes béâtes, mais tout de même !

On notera aussi, tout particulièrement, les grands absents de cette croustillante rubrique « soirée sexy » : les hommes. Pourquoi aucun mannequin masculin n’a t-il été sollicité pour poser en costume de même acabit ?

Faut-il en conclure que dans le « monde des bonnes affaires », les fantasmes sont réservés exclusivement à la gent masculine et que la femme est réduite à la condition d’article festif, destiné à agrémenter les réveillons de ces messieurs ?

Décidément, à la Foir’Fouille, il n’y a pas que les prix qui sont tirés au ras des pâquerettes… Leur vision des femmes aussi !

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Anti Rape Wear : des culottes qui entretiennent la culture du viol.

[Cet article a été publié sur Le Plus Nouvel Obs, le 07/11/13 : http://leplus.nouvelobs.com/contribution/967135-culottes-anti-viol-l-art-d-entretenir-la-culture-du-viol-et-culpabiliser-les-femmes.html]

« Une protection portable quand les choses tournent mal ». C’est le slogan de lancement de l’Anti-Rape Wear, nouvelle marque de sous-vêtements anti-viol, lancée par deux entrepeneures new-yorkaises. Avec cette culotte « révolutionnaire », dont les élastiques se resserrent lorsqu’elle est enfilée, ces jeunes créatrices entendent ainsi offrir aux femmes une meilleure protection contre certaines tentatives de viol.

Conçues spécialement pour résister à l’arrachage et au découpage, ces culottes seraient en effet équipée d’un micro-cadenas avec un code à 4 chiffres et pas moins de 132 combinaisons de verrouillage différente !

Pour l’instant à l’état de simple projet, ces sous-vêtements d’un nouveau genre pourraient rapidement être commercialisés : les créatrices ont eu eu la bonne idée de faire appel à la générosité des internautes via la plate-forme de crowdfunding IndieGoGo et ont déjà réussi à lever plus de 39.000 dollars, sur les 50.000 escomptés.

Bien, bien, bien…

Non mais les filles… Vous êtes sérieuses-là ? Vous pensiez vraiment pouvoir nous refourguer vos ceintures de chasteté, dignes d’une autre époque ? La fièvre du business aurait-elle gravement endommagé votre capital-lucidité ?

Je n’ai pas envie de penser « viol » au saut du lit

Passons à la rigueur sur l’aspect esthétique, hein. Quelle genre de femme suffisamment superficielle ferais-je, en réduisant affaire aussi grave à simple souci de coquetterie ? Parlons donc plutôt confort… Si toutefois cela est encore permis. Et pardon à l’avance pour ces vilaines petites pinailleries, mais j’ai besoin d’être rassurée sur plusieurs points de détails.

Ne se sent-on pas trop saucissonnée, entre les fameux élastiques indestructibles qui enlacent notre abdomen et nos cuisses ? Est-ce que le tissu indéchirable, indécoupable (ignifuge et tout ce que vous voudrez) offre les mêmes qualités respirantes que le coton ?

Parce que, comprenez, si je suis obligée de troquer ma tranquillité d’esprit pour une « paranoïa préventive », si je dois apprendre (et apprendre à ma fille) dès le matin en m’habillant, à penser « viol » en même temps que « douche » et « café », cette culotte se doit a minima d’être confortable et se faire oublier le reste de la journée.

Que fais-je si – après avoir pourtant bien calculé dès mon réveil la probabilité de me faire violer – une envie pressante me saisit de façon inopinée dans la journée ?

Moi, pauvre petite cervelle, qui ne retiens déjà pas mon numéro de sécurité sociale, ni le code PIN de mon téléphone, ni même celui de ma carte bancaire, comment vais-je m’en sortir avec celui de ma culotte !? N’aurais-je pas intérêt à me le faire tatouer discrètement derrière l’oreille, entre deux orteils, ou bien tout autre endroit où le violeur ne pourra pas le lire ?

Une minimisation et une hiérarchisation malsaine de la gravité du viol

Trêve de cynisme. On marche sur la tête tant cette campagne de financement est consternante. Elle contribue, en effet, à entretenir ce qu’on appelle aujourd’hui la culture du viol. Les pires clichés sur le viol y sont concentrés pour en alimenter les deux composantes principales : la minimisation de la gravité du viol et la culpabilisation des femmes.

« Au cas où ça tournerait mal ». La tournure utilisée par la marque est révélatrice. Faut-il le rappeler, un viol n’est pas un accident. Dans les colonnes du Huffington Post britannique d’ailleurs, l’écrivain féministe Louise Pennington prend clairement position contre cette culotte, indiquant que le viol « n’est pas quelque chose qui tourne mal. C’est un crime, avec un agresseur réel qui choisit de violer ». Elle estime, en outre, que cette pseudo invention est « juste une autre façon de blâmer les femmes victimes de viols, plutôt que de s’attaquer à l’épidémie de violence masculine ».

De la même façon, prétendre pouvoir « protéger les femmes contre les conséquences néfastes d’un viol », cela revient à circonscrire ces effets néfastes à la seule pénétration. Or – loin s’en faut – éradiquer le viol, ce n’est pas simplement empêcher l’entrée au vagin. Tout porte ici à croire que la pénétration est considérée comme l’échelon suprême dans l’échelle de gravité ou d’horreur de l’agression subie.

Cette « sacralisation » presque religieuse du vagin, érigé en indicateur de gravité du viol, a un côté choquant. Comme si finalement, l’honneur et la pureté de la femme étaient saufs, dès lors que le coït n’a pas eu lieu. En matière d’agressions sexuelles, il ne peut pourtant pas être établi de hiérarchie des préjudices physiques et psychologiques endurés par la victime.

À l’évidence, une femme se sentira tout aussi meurtrie, atteinte dans sa dignité, d’avoir été insultée, traînée par les cheveux, jetée à terre, touchée et violentée, que si elle avait été prise de force. Il appartient à elle seule d’apprécier la gravité du traumatisme subi. Personne n’est légitimé à lui dicter ce qu’elle doit considérer comme le plus dégradant pour elle-même.

La femme, cet éternel coupable

La marque AR-Wear ne nous épargne pas, non plus, l’écueil du procès d’intention. Les créatrices expliquent ainsi que le sous-vêtement peut être porté lorsque les femmes se placent dans certaines « situations à risques ». Entendez par là « un premier rendez-vous, une soirée en boite de nuit, un jogging en forêt, ou un voyage dans des pays qui ne leur sont pas familiers ». Ces explications véhiculent également un autre cliché sur le viol : la majorité des femmes violées, le sont par une personne de leur entourage et non un inconnu.

En être réduit à inventer ce genre de solutions pour lutter contre le viol, c’est aussi une manière de transférer la responsabilité du viol, de l’homme vers la femme. En considérant que la charge d’éradiquer les viols repose uniquement sur elle. En tout cas, c’est bien le sentiment que l’on a en découvrant cette énième gadget anti-viol. Même quand les créatrices de l’AR-Wear rappellent mollement que la culotte anti-viol « n’a pas vocation à résoudre le problème du viol et que le travail visant à changer la société sur la culture du viol doit continuer ».

Enfin, il y a toujours cette suspicion latente vis à vis de la victime. La femme a été violée par ce qu’elle ne s’est pas assez défendue. Les créatrices de l’AR-Wear partent du principe hasardeux et fantaisiste selon lequel « plus la femme se défend, moins le viol a de chance de se produire ». Et bientôt le non-port de leur culotte anti-viol équivaudra à un consentement…

Des inventions liberticides

Après le « collant à poils » chinois (destiné à écœurer et repousser le violeur potentiel), le soutien-gorge taser (qui envoie des décharges électriques et des textos à la police), le Rape-aXe (préservatif anti-viol équipé de dents), il ne manquait donc plus aux femmes que… leur culotte à cadenas. Grand bien leur fasse !

Reste que, si tous ces gadgets insolites peuvent éventuellement faire sourire (et ce serait bien là leur seul mérite), la décence voudrait qu’ils nous soient au moins présentés dans les médias pour ce qu’ils sont réellement : des inventions liberticides et non des « outils » de libération.

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« Elle » et les femmes qui se forcent à faire l’amour : un dossier bâclé et sexiste

[Article paru le 29/09/13, sur Le Plus Nouvel Obs : http://leplus.nouvelobs.com/contribution/946065-elle-et-les-femmes-qui-se-forcent-a-faire-l-amour-un-dossier-bacle-et-sexiste.html]

Cette semaine sur son site web, le magazine « Elle » a sorti du placard, dépoussiéré et publié un vieux dossier (paru une première fois en mars 2008), intitulé « Faut-il se forcer à faire l’amour ?« .

A la rédac’ « Sexo » du Plus, cet étrange déterrage n’est pas passé entre les mailles de la revue de presse. Comment appréhender un tel article en 2013 ?

L’article de « Elle » n’y va pas par quatre chemins et annonce la couleur dès les premières lignes : « Pour une (vraie) ‘migraine’, combien de fois les femmes prennent-elles sur elles et se forcent à faire l’amour ? » « Assez fréquemment », répond le Dr J.-D. Nasio, psychiatre.

Puis, au gré des témoignages qui se succèdent, le magazine féminin dresse la liste de toute une pléiade de (bonnes ?) raisons qui pousseraient les femmes à accepter de « passer à la casserole », ce même quand le cœur n’y est pas tout à fait.   En voici, le substrat :

1. Par naïveté : « Je pensais que le sexe faisait partie des choses que les couples se doivent de faire » (Lucie).

2. Par résignation : « Mais au final, ça ne me dérange pas, parce que le désir n’est jamais très loin » (toujours Lucie).

3. Pour la paix : « Tant que les sentiments sont là, se forcer fait partie des petits gestes que l’on consent à faire pour rendre le quotidien plus facile » ou « parce que le fait de dire non très clairement peut souvent dégénérer en une dispute qui n’a rien à voir » (Judith).

4. Par gentillesse : « pour ne pas décevoir un partenaire que l’on aime et que l’on ne veut pas blesser […] par tendresse, pour rassurer son partenaire » (la rédaction de Elle).

5. Par calcul : « Par peur qu’il n’aille voir ailleurs, par calcul, pour éviter la rupture » (la rédaction de Elle).

6. Par philosophie et/ou optimisme : « Au final, je sais que faire l’amour me fait du bien. Donc le faire alors que je ne suis pas particulièrement d’humeur libidineuse, c’est à la fois une manière de ne pas vexer mon fiancé et de me détendre » (Laure, 32 ans)

7. Par faiblesse : « Et quand je ne suis vraiment pas très partante, je concède une petite fellation et, ni vu ni connu, tout le monde est content ! » (Marianne 43 ans).

Un article pauvre, stéréotypé et sexiste

C’est article est sexiste, d’abord parce qu’à travers tous ces témoignages – exclusivement de femmes, d’ailleurs – seul le cas de figure où ce sont elles qui se forcent pour le plaisir des hommes est envisagé.   Rien de bien nouveau dans ce constat, puisqu’avec « la pipe, ciment du couple » et l’interview du pédiatre Aldo Naouri, « Elle » nous avait déjà habitué à ce genre de farce.

Stéréotypé, ensuite, parce qu’à la question « est-il bon ou pas pour le couple de s’obliger aux ébats ? », « Elle » laisse entendre que oui et que cette obligation concerne les seules femmes.   Mais pire encore, l’article explique que ne pas vouloir se forcer au nom d’une liberté sexuelle acquise en 1968 serait dépassé. Les femmes ne seraient ainsi plus contraintes et le fait de se forcer serait vécu par la plupart d’entre-elles comme un « acte de tendresse et d’affection », et non comme une « soumission ou une abnégation ».

Pourquoi ne pas avoir interrogé d’hommes ?!

Cet article est d’autant plus pauvre que que le sujet, bien que très intéressant, est appréhendé de manière extrêmement réductrice. À mon sens, il manque à ce dossier un pendant non négligeable : le pendant masculin. Car une chose est certaine : hommes et femmes sont aujourd’hui bien égaux devant l’éventuelle absence de désir.

Les deux sexes sont également équitablement confrontés à la pression ambiante, générée par une société hypersexualisée et injonctive, dans laquelle l’épanouissement de l’individu passe forcément par la performance sexuelle.

Diktat du sexe

Pour autant, si le titre du dossier (« Faut-il se forcer ? ») est racoleur et trompeur (le lecteur, s’attend en effet à trouver une réponse : oui ou non), le fait de se poser cette question ne me paraît pas, en soi, choquant. En vertu du principe de la liberté individuelle, ce choix appartient en effet à chacun et ne souffre, pour cette raison, aucun jugement de valeur.

D’une part, nous avons tous un rapport à la sexualité différent. Là où certains y verront un acte sacré et lourd de sens, d’autres verront en l’acte sexuel ni plus ni moins qu’un langage, un moyen de communiquer avec quelqu’un qui nous plaît.

Par ailleurs, notre degré d’aptitude à faire semblant, notre seuil de tolérance face à l’hypocrisie et notre niveau d’acceptation devant le compromis, varie suivant notre personnalité. Tout est affaire de circonstances, dépend de la propre histoire de chacun et, surtout, de celle qu’il souhaite engager avec son partenaire. Que ce soit au boulot, dans notre vie sociale ou affective, on ment tous. À des degrés différents, certes, mais on ment. On se ment parfois à soi-même, aussi.

Une pause s’impose

Ce qui me choque le plus, à vrai dire, c’est qu’en 2013, des magazines qui se veulent ouverts et progressistes en soient toujours réduits à titrer de la sorte. Il me semble qu’ils ne risqueraient pas la peine de mort en osant de temps en temps une une du style : « 10 bonnes raisons de ne pas faire l’amour ».

Et puis, faut-il encore le rappeler, ne pas faire l’amour ne signifie pas ne pas avoir de vie sexuelle. Une abstinence volontaire ou subie peut, au contraire l’exacerber en favorisant l’auto-érotisme (tellement plus joli que le terme de masturbation), les fantasmes la sensibilité à d’autres sources de plaisir. Tout ceci apporte aussi une grande satisfaction. Et presque jamais de déception (à moins d’avoir deux mains gauches et une imagination sacrément indigente).

Rompre avec le sexe permettrait ainsi de mieux se redécouvrir, de réveiller ses désirs en se donnant le temps de les (ré)identifier et se les (ré)approprier.

Consommer moins pour consommer mieux

En ces temps de crise (crise du sexe ?) où l’on nous donne à « consommer » du sexe jusqu’à l’overdose, ne serait-il pas préférable de consommer moins, pour consommer mieux ?

Certains auteurs ou écrivains, d’ailleurs, ont à leur manière amorcé une douce résistance face à cette normalisation moralisatrice et injonctive du sexe. La réflexion menée par Peggy Sastre dans son ouvrage « No sex » ne manque pas d’intérêt. Les confidences de Sophie Fontanel, femme intelligente, séduisante et abstinente (oui c’est possible) sont touchantes et interpellent dans son livre « L’Envie ». « L’amour sans le faire », roman de Serge Joncour nous indique, par ailleurs, qu’il peut être salutaire parfois de savoir s’arrêter pour « réapprendre la patience et la sauvagerie ». On ne donne pas à manger à quelqu’un qui a soif… Et si ceux qui ne font pas ou plus l’amour avaient simplement soif d’autre chose ?

Et après tout, nous serrer un peu la ceinture de temps en temps, ne pourrait-il pas nous faire du bien ? Ne serait-ce que pour voir – au moins une fois – ce qui se passe légèrement au dessus.

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Clara Dupont-Monod, le féminisme et France Inter : une interview déconcertante

[Article paru le 27/08/13, sur Le Plus Nouvel Obs : http://leplus.nouvelobs.com/contribution/926470-clara-dupont-monod-le-feminisme-et-france-inter-une-interview-deconcertante.html]

Pour sa rentrée sur France Inter, la journaliste Clara Dupont-Monod (qui remplace Pascale Clark pour l’Invité de de 7h50) avait convié ce lundi Anne-Cécile Mailfert, porte-parole d’Osez le féminisme. Le propos initial de cette rencontre était d’évoquer l’initiative lancée par le collectif, visant à faire entrer des femmes au Panthéon, aux côtés de Marie Curie et de Sophie Berthelot (qui doivent, il est vrai, s’y sentir bien seules).

La colère des féministes

Seulement voilà, la nouvelle recrue de France Inter – débordant de zèle – a déroulé un questionnaire pétri de poncifs nauséabonds et condescendants sur le féminisme : l’interview tourne rapidement en véritable procès d’intention, provoquant l’ire interloquée de nombreuses militantes.

http://http://www.dailymotion.com/video/x13o5vs_anne-cecile-mailfert-les-heureuses-elues-au-pantheon-sont-o-de-gouges-l-michel-g-tillion-s-de-beauvo_news?start=6

Voici les réactions indignées de quelques unes d’entre-elles, sur twitter, suite à ce moment de radio surréaliste.

Caroline De Haas@carolinedehaas

16 Retweets   6 favoris
Les Martiennes@lesmartiennes

2 Retweets   1 favori
Alice Coffin@alicecoffin

« C est un  qui ne compte pas emasculer les hommes? »festival de poncifs et ignorance dans questions de clara dupont-monod @f_inter

22 Retweets   2 favoris
CrêpeGeorgette@valerieCG

c’est ce qu’on appelle une interview de fond. Passionnant. peut-être un peu complaisante, bête, racoleuse et cliché mais intéressante hein.

1 Retweet

D’autres féministes ont répondu à Clara Dupont-Monod sur leurs blogs ici ou .

Un moment de radio déconcertant

Mais quelle mouche (ou abeille devrions-nous dire, pour les raisons évoquées plus loin dans ce billet) a donc pu piquer notre amie Clara Dupont-Monod ? Car il faut bien admettre que les questions de la nouvelle intervieweuse politique de France Inter sont pour le moins orientées.

Jugez-en par vous-mêmes :

– « Vous ne pensez pas que les nouveaux féministes, ce sont en fait les hommes ? »

Ben voyons ! Attribuons tout le mérite des combats féministes aux hommes… Cela s’appelle du « men hangin' » et c’est pas très glorieux comme procédé de racolage.

 « Osez le féminisme, c’est un féminisme qui est contre les hommes ou tout contre les hommes ? »

Comprenez ici qu’il n’y a nulle autre alternative possible dans les rapports hommes-femmes : ou bien on déteste les hommes ou bien on les suce. Est-ce clair ? Un poil binaire, comme analyse journalistique.

– « Donc c’est un féminisme qui ne compte pas émasculer les hommes ? C’est une bonne nouvelle, je vois tout le monde qui se détend dans le studio. »

C’est qui tout le monde ? Peut-être Clara Dupont-Monod évoque t-elle le personnel réputé quasi-exclusivement masculin de France Inter ? Je croyais pourtant qu’une grosse prise de conscience concernant l’absence de parité au sein de l’équipe dirigeante de cette radio, avait eu lieu, notamment lors de cet événement tragique d’invasion de leurs locaux par les « Barbues ».

– « La parité, ça veut dire que si on doit choisir entre une femme incompétente (au hasard) et un homme compétent (encore au hasard), ça sera toujours la femme incompétente, non ? »

Réfléchis un peu, Clara… Si le féminisme dont tu parles existait vraiment, France Inter t’aurait alors choisie pour d’autres raisons (besoin d’une potiche ?) que celles inhérentes à ton supposé talent. On ne va quand même pas t’expliquer que la parité, c’est un truc qui s’applique à compétence égale, et uniquement à compétence égale.

Et enfin (le meilleur ayant été gardé pour la fin) :

– « Est-ce que les féministes ont de l’humour ? Oui ? Cela mérite une dépêche AFP ! »

Possible que les féministes n’aient pas plus d’humour que la moyenne, mais ne vaut-il pas mieux en avoir peu – et même ne pas en avoir du tout – qu’en avoir un vaseux ?

Victime du syndrome de la reine des abeilles ?

Second degré, excès de zèle ou ignorance ? Allez savoir… Je me garderais bien, moi-même, de tacler cette journaliste qui ne fait, après tout, que son métier (de « gratte-poils », pour laquelle on la paie, vraisemblablement).

Je lui ferais tout au plus remarquer que la liste des clichés méphitiques qu’elle énumère sur le féminisme n’est pas exhaustive. Elle oublie en effet celui sur le syndrome de la reine des abeilles – syndrome dont il se pourrait bien qu’elle souffre elle-même, sans le savoir.

Le « Queen Bee Syndrome » (dans sa version anglophone), donc, serait ainsi un syndrome psychique et/ou social, selon lequel une femme arrivée au pouvoir n’aide pas ses collègues et subalternes féminines et essaie même plutôt de les écraser.

Dans les années 1970, des chercheurs américains (Toby Epstein Jayaratne et Carol Travis) auraient en effet « découvert » que les femmes étaient loin d’être solidaires entre-elles, au travail en particulier. Leurs études auraient ainsi montré que « les femmes qui réussissaient dans des secteurs d’habitude dominés par les hommes, étaient obsédées par l’envie de conserver leur pouvoir et s’opposaient très souvent aux succès d’autres femmes ».

De même, une autre étude, réalisée en 2011 par le Workplace Bullying Institute, montre quant à elle que les « femmes qui tyrannisent les autres salariés au bureau dirigeraient directement leur haine contre leurs pairs 80 % du temps quand les hommes sont plus équitables et s’en prennent aussi bien aux messieurs qu’aux dames ».

Moi-même, lorsque j’ai débuté ma vie active, j’ai dû me frotter à de vilaines « Queen Bees ». Assez bien diplômée et pas trop repoussante, je me suis sentie comme un loup qui entre dans la bergerie. Mes collègues féminines me tournaient cruellement le dos à la machine à café, pendant que les collègues masculins, eux, s’empressaient de glisser un jeton dans la fente du distributeur à café pour me l’offrir.

Ainsi va la vie. Il arrive, de temps à autre, que les femmes se tirent dans les pattes entre-elles, donnant ainsi raison à l’adage voulant que la femme soit, finalement, son propre ennemi. C’est sans doute la leçon que les féministes semblent devoir tirer de cette affaire : ne jamais oublier que le diable s’habille aussi, parfois, en Prada.

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